Gracq et le Goncourt

Publié le par Louis

« La France qui s’est longtemps méfiée du billet de banque, est en littérature le pays d’élection des valeurs fiduciaires.»
 
Julien Gracq (1910-2007), La littérature à l’estomac

 

 Julien Gracq est mort, mais comme écrivait le poète contemplatif chinois Li Po, son esprit donne de la force au vent de l’automne
 
 Outre ses remarquables romans intemporels comme le Rivage des Syrtes, ce modeste professeur d’histoire géographie méprisant la notoriété, restera dans les annales littéraires pour avoir refusé le Goncourt. Pour lui, le système des prix littéraires dévalorisait la littérature au lieu de la servir.
 
 Il avait bien raison, le Goncourt a toujours été considéré comme une vulgaire machine commerciale, une sorte d’institution française au même titre que le Beaujolais nouveau. Ce prix n’intéresse les journalistes que pour son côté festif et compétitif : à l’issue d’un repas fort arrosé, quelques convives triés sur le volet s’arrogent le droit de décider quel est le meilleur livre de la rentrée littéraire.
 
 Certains écrivains considèrent même le Goncourt comme un cadeau empoisonné risquant de ruiner leur carrière. C’est en tout cas le point de vue de l’auteur Iegor Gran dans son roman Truoc-nog (l’anagramme de Goncourt). Ce petit livre est une brillante satyre du microcosme littéraire dans laquelle le personnage principal vit comme une malédiction le fait d’être nominé sur la liste des écrivains goncourables !
 
 Si Gracq est resté fidèle à ses principes en refusant le Goncourt (plus d’un écrivain avide de célébrité aurait fait machine arrière), il regrettable qu’il ait poussé le zèle à refuser d’être publié en poche. Cela lui aurait permis d’élargir son lectorat et surtout d’être lu dans les lycées. Mais il n’est jamais trop tard, et la balle est désormais dans le camp des éditions José Corti  
 
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Publié dans Point de vue

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